Sur la trace des pierres précieuses

 
Bruno Sabot, docteur en géologie, court la planète pour accompagner la prospection et l'exploitation de gisements de pierres précieuses.

L'homme est discret. Courtois. En entrant à « Pierre et Compagnies », la bijouterie de la rue Notre-Dame, face à la basilique Saint-Julien de Brioude, nul ne se doute qu'il rencontre un scientifique chevronné, doublé d'un voyageur aventurier à ses heures...

« J'ai d'abord dépensé beaucoup d'énergie à écrire ma thèse de doctorat en géologie, concernant la traçabilité de l'émeraude », énonce calmement Bruno Sabot. Ce qui l'a déjà conduit à visiter plus de la moitié des gisements de cette nature à travers le monde !

Certificat d'authenticité

Après avoir travaillé pour le compte d'un grand joaillier de la place Vendôme, à Paris, c'est en Haute-Loire qu'il a choisi de s'installer. Pour sa qualité de vie. Mais aussi parce qu'il va progressivement y développer, en indépendant, plusieurs activités. « J'y ai monté mon propre laboratoire de contrôle, Geokara. Pour 50 euros par pierre et par expertise, je fournis des certificats d'authenticité sur la qualité de leurs pierres précieuses à de gros négociants grossistes, des antiquaires ou à des artisans créateurs, dans la France entière, dont Paris, Lyon ou Nice ». Dernière preuve de sa notoriété grandissante : fin juillet, ses certificats ont accompagné des bijoux mis aux enchères lors de la célèbre vente annuelle de la maison Tajan, à Monte-Carlo.

« J'ai établi des tarifs volontairement inférieurs à ceux pratiqués par d'autres laboratoires, explique-t-il, afin d'inciter les professionnels à y avoir recours, sans que cela n'alourdisse trop la facture finale payée par le consommateur. Actuellement, le professionnel n'a pas d'obligation légale de fournir au consommateur ce document, délivré par un laboratoire indépendant, sauf si l'acheteur le réclame ».

Quel est l'intérêt de la manoeuvre ? « Dans le contexte actuel mondial, le consommateur doit savoir qu'il peut acheter peu cher des pierres précieuses, mais sans garantie quant à leur niveau de qualité. À mon avis, pour se démarquer, les professionnels français doivent quant à eux s'orienter vers des produits créatifs et de qualité dûment authentifiée. Chacun reste alors libre de ses choix d'achat, mais en étant correctement informé ».

À quelles arnaques peut-on être confronté ? « Lors de l'exploitation des gisements avec des explosifs, les poches où se concentrent les pierres précieuses peuvent être involontairement endommagées. Des fractures peuvent aussi survenir lors de leur taille. Il est alors possible de boucher ou de masquer ces imperfections avec des résines qui ont le même indice de réfraction par rapport à la lumière, ce qui rend ces changements invisibles à l'oeil nu. Un premier contrôle rapide est faisable sous microscope. Puis je dispose dans mon laboratoire de techniques beaucoup plus perfectionnées ».

Des missions autour du monde

Bruno Sabot a aussi développé une autre activité, encore moins connue : celle de conseil en prospection et en production des gisements, pour le compte de sociétés ou de gouvernements. À ce titre, il est par exemple déjà intervenu en Afghanistan ou à Madagascar. « Chercher des pierres précieuses, explique-t-il, est une opération à risques, à tout niveau. Pour l'or, les sondages carottés permettent d'obtenir des grilles statistiques précises en ressources potentielles. Ce n'est pas le cas pour les pierres précieuses, qui ont tendance à se concentrer dans des poches. Je connais une exploitation minière à Madagascar qui a travaillé pendant dix ans sans rien trouver avant de tomber sur trois tonnes d'émeraude ! ».

Quant à l'exploitation elle-même, elle comporte de nombreux dangers, dont celui du vol par les ouvriers. La taille peut également endommager les pierres. « Il y a un an et demi, explique Bruno Sabot, je me suis rendu en Inde pour conseiller un investisseur du Radjasthan, qui avait un projet de taille de pierres avec une soixantaine d'ouvriers ». Bruno Sabot a aussi choisi ce métier parce qu'il aime voyager et aller à la rencontre d'autres cultures?

Chantal Béraud

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