Bijou ou gadget, le retour des boutons de manchette

Ils ont longtemps été abandonnés dans le fond d'un tiroir. Désormais les boutons de manchette retrouvent leur place. Pour la Fête des pères, le Printemps propose ceux de la nouvelle collection Mauboussin baptisée "Tu es le sel de ma vie" en or blanc et pavage diamant, vendus la bagatelle de 990 euros. Etonnant pour un accessoire qui semblait, un peu comme la montre à gousset, se transmettre de génération en génération et ne se porter que dans les grandes occasions.

Le bouton de manchette s'affiche même sur la Toile. Trois jeunes hommes ont lancé, le 1er décembre 2008, un site consacré à la vente de cet accessoire. "Nous nous sommes aperçus qu'il était difficile de s'en procurer dans des styles différents à des prix abordables", raconte Renaud Martel, l'un des associés de La Maison du bouton de manchette. Le site enregistre une hausse régulière de son chiffre d'affaires, et se déploiera bientôt au Royaume-Uni et aux Etats-Unis.

Réservé jadis aux messieurs chics ou aux cérémonies de mariage, le bouton de manchette s'est démocratisé. "Synonyme d'élégance et de raffinement, il compose le détail final d'une belle chemise coordonnée ou non à la cravate. L'oeil de votre interlocuteur s'y pose toujours", observe Aymeric Franco, directeur commercial Europe chez Hackett. Proposé "en coton, en argent, en or ou en métal, le bouton de manchette est à la portée de tous les budgets, et peut se porter en toutes circonstances", affirme-t-il.

Davantage qu'un accessoire, le bouton de manchette est un des rares bijoux que l'homme peut se permettre de porter sans mettre en péril sa virilité. Zilli ose le grand luxe avec un modèle en or blanc 18 carats, nacre, diamants et émeraude vendu... 16 650 euros ! Dans le même registre, Brioni a créé une collection en pierres dures ou semi-précieuses, or blanc ou or jaune.

PERSONNALISER SON LOOK

Mais ce sont souvent les moins chers et les plus originaux qui séduisent les hommes. La Maison du bouton de manchette propose 150 modèles à partir de 3 euros dans une dizaine de coloris et des formes aussi différentes qu'une tête de mort, un Lego, une carte à jouer, ou une pièce de puzzle. Paul Smith fut un des premiers créateur à détourner la fonction de ce bijou synonyme de sérieux en un gadget amusant orné de pin-up ou d'hologrammes. Chez Yves Saint Laurent, ils prennent la forme de clés. "Ce sont des petits détails pour personnaliser son look, c'est une façon de s'exprimer quand on se serre la main", estime Rossella Jardini, qui dirige la maison Moschino, où l'on trouve ces accessoires en forme de coeur, d'ancre, de dauphin...

"Beaucoup de chemises étant désormais à boutonnage mixte, le bouton de manchette vient ajouter une note personnelle à la tenue", indique Paul Smith. Il est aussi possible de laisser sa chemise à poignets mousquetaires sans bouton de manchette. Marc Bukart, responsable du stand Tiffany au Printemps Haussmann, juge qu'il ne faut "jamais" le faire, il est vrai que la marque ne produit que des bijoux ! "Lorsque vous en avez, pourquoi ne pas en porter ?", temporise Massimiliano Giornetti, qui dessine les collections masculines de Ferragamo.

D'autres créateurs s'autorisent plus de libertés. "Cela fait longtemps que je retrousse les manches des chemises et même des costumes. C'est un geste qui "dédramatise" leur rigueur. Aujourd'hui, les règles et les carcans n'existent plus dans la mode masculine. Tout est possible à partir du moment où on le fait avec allure", raconte Kris Van Assche. Lors de son dernier défilé, ses chemises à poignets mousquetaires étaient nouées par des rubans. Une autre histoire, plus romantique.

Joël Morio
 
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